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TGV
l'air fume au bord des branches nues un ciel
bas
fait croire aux yeux qu'ils voient enfin la
matière
qu'est-ce que l'espace entre les doigts
ouverts
un clocher cloue dans la vue un point
d'histoire
forêt puis blé vert un reste de soleil
quelques vaches posées comme pierres
blanches
un pont un verger une lampe précoce
le jour hésite à lâcher le bord du monde
il doit prendre déjà de l'autre côté
tel un vieux drap revenu de trop
d'amours
un ralenti fait découvrir des gentianes
un talus au taillis piqueté de rouge
deux crétins cravatés parlent de
surcoût
d'homme interface et
d'avant-de-voir-faut-voir
l'horizon bleuit pour s'offrir à la
nuit
un coup de poing lumineux crève un
instant
la vapeur noire et joue à l'éclat divin
il y a une beauté désespérante
quelque chose au bout comme un dernier
cadeau
quand la vie se retire en laissant à sec
la pincée de rien qui lui donnait du
goût
"Le reste du voyage", POL, 1999
Bernard Noël
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